DU RIO DE S. FRANCISCO. 35 Occupé à chercher des plantes, je ne m’apercevais pa que nous nous écartions de la direction du village. Cepen dant, comme le jour commençait à baisser, je m’avisai de demander à mon guide à quelle distance nous étions de Corumba. Probablement à 5 legoas, me répondit-il; mais nous allons bientôt trouver une maison. Je ne pus m’empê cher de faire à cet homme quelques reproches, car il était évident qu’il nous avait égarés. Nous continuâmes à mar cher, et bientôt nous aperçûmes la petite habitation qui m’avait été annoncée. Une négresse se présenta à la porte, et, n’ayant nulle envie de nous recevoir, elle m’assura qu’il n’y avait que 1 lieue de là jusqu’au village. Honteux de s’être trompé de chemin, le guide, avec cette inconsis tance qui est le partage des hommes de sa couleur, se ré tracta aussitôt de ce qu’il m’avait dit d’abord, et se mit à appuyer la négresse; une discussion s’engagea entre nous, mais j’y mis bientôt fin en disant au nègre : Je veux bien qu’il n’y ait que 1 lieue d’ici à Corumbâ; mais, pour faire 1 lieue, il ne faut pas plus de deux heures ; je consens à me mettre en route, et, si dans deux heures nous ne sommes pas arrivés, je vous préviens que je ne vous donnerai pas la moindre chose. Mon homme se rétracta alors une seconde fois; il convint qu’il pouvait bien y avoir plus de 1 lieue jusqu’au village, et je me décidai à ne pas aller plus loin. La négresse, que je priai de me laisser coucher dans la maison, me répondit que son maître ne l’avait pas autorisée à accorder cette permission. Eh bien, je vais la prendre, repartis-je, et j’entrai sans cérémonie. Ile um homem man- dado (c’est un envoyé du gouvernement), s’écria le nègre ; ces paroles, suivant l’usage, produisirent un effet magique, on ne fit plus une seule objection.