DU RIO DE S. FRANCISCO. 59 deux ans plus tôt, sur la route de Villa Rica ne m’avait point préparé à un changement aussi brusque. Il produisit sur moi une vive impression de surprise et d’admiration : ces campos à perte de vue sont une image bien moins impar faite de l’immensité que la mer, lorsqu’on y jette les yeux d’une plage peu élevée, et cette image devenait plus frap pante encore au sortir des forêts primitives, où souvent on toucherait presque de la main les objets qui bornent l’horizon. En quittant les bois vierges, je pus faire une comparaison exacte entre la disposition des terrains où ils végètent et celle du sol qu’occupent les campos, et je me confirmai dans les idées que j’avais déjà sur les causes d’une diffé rence si prononcée dans la végétation (1). Les forêts cou vrent des contrées hérissées de montagnes roides et escar pées, qui se garantissent les unes les autres contre la force des vents ; et en même temps les ruisseaux, qui, entre les monts , arrosent des vallées étroites et profondes , entre tiennent dans l’air une fraîcheur et une humidité conti nuelles. Au contraire, dans les pays de campos, les mornes sont arrondis et s’élèvent par une pente douce; les vallées qui séparent ceux-ci sont larges èt peu profondes, et enfin les ruisseaux sont peu multipliés; aussi la sécheresse est- elle très-grande dans ces régions, et les vents y régnent en liberté, deux causes qui ne permettent pas à la végéta tion de devenir plus vigoureuse. Mais, si le liane d’un morne présente un enfoncement qui soit abrité, si quel que ruisseau arrose un vallon, on est sûr de trouver là un bouquet ou une lisière de bois vierges, qui, défrichés, (i) I oyage dans les provinces de llio de Janeiro, etc., Il, 23.