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MAISONS A CL U N Y. 83 ceaux de fûts géminés et accouplés, et un pilastre presque central orné de can nelures, de dents de scie et de têtes de clous. Toute cette ordonnance de part et d’autre repose sur un bandeau bien profilé qui se reproduit plus haut sur une arcature, décoration ordinaire de ce genre de façades. Le mur, en fort bel appa reil, continue de s’élever jusqu’au toit saillant d’un mètre environ, comme il arrive souvent. Le caractère roman est profondément empreint dans ces deux constructions contiguës; en les reportant au xn» siècle, c’est à ses meilleures années que nous devons en attribuer les principaux motifs, harmonieuses inspi rations où nous aimons à reconnaître, ainsi que nous l’avons déjà dit, l’origine première de celles qui, quatre cents ans plus tard, feront de nouveau notre admiration. En architecture surtout, il est vrai de dire qu'il y a plus de combi naisons nouvelles d’idées que d’inventions proprement déterminées. Il ne nous reste plus, pour achever celte description, qu’à parler de celte troi sième habitation privée qu’il nous a fallu aller chercher en une autre partie de la ville. Comme il est facile de l’admettre dès son premier aspect, elle ne pouvait être que la demeure d’une famille qui voulait, après des travaux prospères, jouir du repos et de l’aisance, fruits bien mérités de ses efforts. Une porte exhaussée sur trois marches qui la dépassent et commencent le rampant d’un escalier droit; une espèce de meurtrière sur son linteau , un soupirail rectangulaire laissant arriver quelques rayons à une salle basse ou cellier, voilà le peu d’ouvertures qui s’aperçoivent au bas de cette maison, ainsi protégée contre toute atteinte du dehors. Au premier étage, une double fenêtre à colonnette mitoyenne, dont le chapiteau sert de retombée à deux cintres délicatement sculptés en avant, trois roses à fond plein, par-dessus cela, une arcature ayant à peu près pour limite les impostes, telle est, sur la face antérieure, la seule vue que les habitants aient du côté de la rue ; au second, la disposition serait entièrement la même, si les trois roses d’ornement en relief n’v manquaient aux archivoltes. Où pourrait-on rencontrer rien de plus simple et de plus frappant par sa singulière et pittoresque physionomie? Est-il muraille aussi unie et de pareille apparence qui ait jamais reçu depuis si bonne part de sculpture en si peu d’espace? L’art ne se montre-t-il pas sans dédain jusqu’au milieu de cette maçonnerie en moellons que le temps a rongée çà et là sur sa face en respectant ce que le ciseau a si bien travaillé? et n’est-ce pas là sa mission d’embellir tout abri de l’homme, que ce soit l’humble toit d’un sujet ou le palais d’un souverain. Mais il faut qu’il sache lui-même mesurer son intervention au degré d’importance de l’objet qu’il veut déco rer; et cette sage dispensation de ses faveurs qu’il a si bien su faire chez nos aïeux, pourquoi ne la renouvellerait-il pas pour nous, si nous savions nous en rendre dignes comme eux dans les différentes sphères de nos condi tions sociales. Quelle serait notre satisfaction de voir nos efforts contribuer à l’accomplissement de ce vœu et de cette espérance!